83 % du marché cloud européen est concentré entre les mains des hyperscalers américains. Cette situation signifie très concrètement que les fournisseurs de cloud US et le gouvernement américain ont un accès direct aux données européennes – y compris aux données sensibles –, et donc à nos systèmes vitaux, ministères, industries de défense, hôpitaux, établissements scolaires, etc.
La souveraineté numérique européenne se retrouve, de fait, entre les mains des principaux fournisseurs de cloud US et du gouvernement américain via des dispositifs tels que le Cloud Act. Cette situation est particulièrement risquée, à la fois pour l’autonomie industrielle, institutionnelle et stratégique de l’Europe, mais aussi pour la continuité de ses systèmes vitaux et activités critiques.
La configuration actuelle est exacerbée par les agissements de Donald Trump, qui pourrait bien forcer l’Europe à s’émanciper stratégiquement de la tutelle des États-Unis. Les pays européens sont en train de mesurer le prix de leur dépendance technologique. Se retrouvent-ils face à une opportunité historique les incitant à reprendre la main sur leur souveraineté numérique ?
L’effet Trump, révélateur et catalyseur des fragilités européennes
Le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche agit comme un révélateur et un accélérateur des fragilités européennes en matière de souveraineté – qu’elle soit militaire, diplomatique, énergétique ou numérique. De fait, l’Union européenne s’avère dépendante des États-Unis dans de nombreux domaines, qu’il s’agisse de la défense (OTAN, équipements américains), de l’énergie (avec le gaz naturel liquéfié – GNL), du numérique (cloud, cybersécurité, réseaux sociaux, etc.) ou encore de la diplomatie.
Concernant le volet numérique, le marché français du cloud est largement dominé par les géants américains, 71 % du marché étant détenu par Amazon, Microsoft et Google. En cas de crise internationale ou de prise de décision unilatérale des États-Unis, les systèmes vitaux français pourraient sérieusement être mis à mal, ralentis, déstabilisés… voire mis à l’arrêt. La maîtrise des technologies et des infrastructures stratégiques constitue un réel enjeu de souveraineté. Et pour défendre ses intérêts et ses valeurs, l’Europe doit reprendre la main sur ses données.
Repenser la souveraineté numérique européenne, une urgence
D’un point de vue géopolitique, notamment du fait de ses prises de position sur le conflit en Ukraine et sa guerre commerciale, le président Donald Trump a permis de réveiller les pays européens sur plusieurs thèmes clés. Le Vieux Continent a notamment pris conscience de la nécessité d’augmenter ses budgets de défense (la Pologne se projette par exemple vers les 4 % de son PIB annuel), de revoir à la hausse sa production d’armements et de munitions, de protéger ses infrastructures critiques (énergétiques, notamment), de revoir ses politiques industrielles au sujet des secteurs jugés stratégiques pour son autonomie et sa sécurité, etc.
Sur le volet de la souveraineté numérique et technologique, les pays européens sont également résolus à reprendre davantage d’autonomie. Ce souhait porte à la fois sur le cloud (d’après le CIGREF, les pays européens paieraient chaque année 264 milliards d’euros leur dépendance aux fournisseurs US de cloud), la cybersécurité, ou encore la protection des données sensibles.
Le réveil européen en matière de numérique n’a d’ailleurs pas attendu le second mandat de Donald Trump. Le projet GAIA-X, initiative franco-allemande visant à créer une infrastructure de données européenne, a été lancé en 2020. Cependant, le contexte actuel oblige les États membres à accélérer sur un certain nombre de sujets.
L’European Chips Act, signé en mars 2025, marque par exemple la volonté européenne de lancer une vague d’investissements dans la fabrication de semi-conducteurs. En mai 2025, la France et l’Allemagne ont également annoncé leur souhait de renforcer la coopération numérique franco-allemande.
Le choc que constitue le retour au pouvoir de Donald Trump pourrait en réalité s’avérer salutaire pour l’Europe, l’obligeant à sortir de l’illusion du « parapluie américain éternel ». Les pays européens ont en effet déjà démontré, par exemple lors de la pandémie de Covid-19 ou du déclenchement du conflit en Ukraine, leur capacité à progresser lorsqu’ils sont confrontés à des crises existentielles. Le second mandat de Donald Trump pourrait leur permettre de progresser comme ils l’ont déjà fait lors des précédentes crises. Plus réaliste, plus autonome et plus intégrée stratégiquement, l’Europe en sortira grandie.
La protection des données sensibles, centrale dans la recherche de souveraineté numérique européenne
L’extraterritorialité du droit américain, illustrée par le Patriot Act et le Cloud Act (qui permettent aux autorités américaines d’accéder aux données hébergées par des prestataires américains), constitue une menace directe à la souveraineté numérique européenne. Reconquérir cette souveraineté passe nécessairement, pour les pays européens, par une maîtrise de leurs données les plus sensibles, qui doivent être mises à l’abri de toute ingérence.
En France, des figures comme Stanislas de Rémur, CEO et co-fondateur d’Oodrive, incarnent cette volonté de souveraineté numérique active. Membre du Comité Stratégique de Filière « Logiciels et Solutions Numérique de Confinace », Stanislas de Rémur co-pilotera, avec Olivier Vallet, PDG de Docaposte, un groupe de travail portant sur les données sensibles, dont la vocation est de :
- Définir la notion de « donnée sensible » dans un cadre opérationnel et partagé.
- Travailler en coordination avec les acteurs institutionnels (CESIN, CIGREF, CNIL, ANSSI, etc.).
- Établir une méthode commune pour la classification, la protection et la gouvernance de ces données dans les usages numériques français.
Il s’agit là d’une avancée concrète pour la structuration d’un écosystème numérique souverain dont la France serait le fer de lance.
Souveraineté numérique européenne : transformer la prise de conscience en action
Les positions de Donald Trump remettent en question la souveraineté européenne et exigent de l’Europe une réponse forte et coordonnée. Plutôt que de subir une pression croissante en matière de numérique, l’Union européenne a tout intérêt à agir pour bâtir une Europe souveraine et résiliente, affranchie d’une situation qui la rendrait 100 % dépendante aux acteurs américains. L’UE semble avoir pris la pleine conscience de ces enjeux.
Des voix commencent à s’élever pour promouvoir l’établissement d’une « préférence européenne en matière de numérique ». En tant qu’acteur majeur du cloud de confiance et de la sécurité des données, Oodrive soutient ces initiatives.